Vallesse, un projet pour donner aux enfants le goût de la lecture

TRECC a annoncé en juin avoir investi dans Vallesse, une maison d’édition ivoirienne spécialisée dans la publication de livres destinés aux enfants et à la jeunesse. Fidèle Diomandé, PDG de Vallesse, explique pourquoi ce genre d’entreprise peut contribuer à l’amélioration de la qualité de l’éducation dans le contexte ivoirien.
Q : Quel était votre objectif en créant Vallesse Éditions ?
R : Vallesse Éditions est une maison d’édition qui a été créée en 2005 par de jeunes Ivoiriens avec pour ambition de contribuer à l’éducation de la jeunesse. Il y a dix ans, on s’est dit que les livres de littérature générale au programme étaient essentiellement des livres venus d’Europe. Le jeune Ivoirien n’était donc pas suffisamment en contact avec des romans qui relataient son vécu ou qui répondaient aux questions qu’il se posait.
Q : Après 13 ans de parcours, vos livres sont-ils suffisamment présents dans les écoles de Côte d’Ivoire ?
R: Oui, très tôt nous avons commencé à faire des ouvrages de littérature que nous avons soumis à l’agrément pour le programme scolaire des lycées et collèges. Aujourd’hui, nous avons onze ouvrages de littérature générale sur la liste du programme scolaire. À côté de ces œuvres, le ministère de l’Éducation nationale nous a confié des manuels scolaires. Vallesse Éditions a édité plusieurs parascolaires qui ont obtenu l’agrément du ministère. Aujourd’hui 80-85 % des lycées et collèges de Côte d’Ivoire utilisent au moins deux ouvrages de Vallesse.
Q : Les enfants en âge d’aller au primaire en zone rurale ont-ils accès à de la littérature acceptable ?
R : Ce n’est pas toujours évident. Cela s’explique par le fait que les librairies et les espaces dédiés aux livres n’existent que dans quelques zones urbaines. Il faut souligner que, du fait de la grave crise que nous avons connue de 2002 à 2011, des librairies ont fermé ici et là. Cela dit, pendant la rentrée scolaire, des commerçants s’érigent en libraires pour proposer des livres ainsi que d’autres articles scolaires partout où on peut trouver des écoles, y compris dans les zones rurales.
Q : Pouvez-vous donner un exemple d’histoire qui n’était pas écrite en Côte d’Ivoire avant que Vallesse n’apparaisse ?
R : Je peux vous donner l’exemple de la problématique de l’enfant soldat qui a été abordée dans une œuvre de François d’Assise N’Dah intitulée « Le retour de l’enfant soldat ». La grave crise que nous avons connue a montré que des enfants ont été enrôlés et ont pris part aux combats que se sont livrés les forces en conflit. Nous avons donc publié ce livre pour mettre en lumière les difficultés que posait la réinsertion sociale de ces jeunes combattants. Après la guerre, que deviennent-ils ? Peuvent-ils revenir dans le village où ils ont pu commettre des atrocités ? Comment y seront-ils accueillis ? Quelle place faut-il leur réserver ? Toutes ces questions évoquées dans cette œuvre ont permis d’ouvrir le débat sur la paix et la réconciliation et sur l’avenir de l’enfant soldat. C’est donc fort à propos que ce texte ait été agréé pour le programme scolaire depuis 2008.
Q : Quel lien y a-t-il entre une maison d’édition et la qualité de l’éducation ?
R : Une maison d’édition est une activité culturelle, mais c’est aussi une activité éducative. Avec chaque livre que nous publions, nous espérons contribuer un tout petit peu à l’éducation de la jeunesse, à l’éducation des Ivoiriens, et même à l’éducation du monde entier – parce que le livre voyage ! Nous espérons que chaque lecteur, où qu’il soit, puisse se construire en lisant nos livres.
Q : Pourquoi est-il nécessaire que les parties prenantes de l’éducation mettent en valeur des projets comme le vôtre ?
R : D’abord, parce que le livre est très important dans la vie d’une nation ; ensuite, nous évoluons dans le secteur de l’éducation qui est un domaine tout aussi important pour le développement d’un pays. C’est pour cela que, très souvent, nous recherchons des thèmes qui s’intéressent aux jeunes et qui leur parlent […]. TRECC ne s’est donc pas trompé en investissant dans Vallesse Éditions. Mais TRECC n’a pas vocation à rester indéfiniment en Côte d’Ivoire. Pour l’après-TRECC, il faut mettre en place des mécanismes qui pourront contribuer véritablement à changer les habitudes des enfants et leur donner vraiment le goût de la lecture.
TRECC travaille en partenariat avec I&P pour soutenir des entreprises et des solutions basées sur le marché cherchant à améliorer l’éducation dans les environnements à faibles ressources. Nos investissements se font via l’Education Impact Fund (EIF), fonds d’impact dédié à l’éducation.
Photo d’illustration : deux filles lisent des livres à la bibliothèque du Centre culturel d’El Fasher, au Darfour du Nord, Soudan (UNAMID via Flickr, CC-BY-NC-SA)